Les brèves de comptoir

Au bar de la Brasserie et à celui du Chez Nous, pour une fois, les news tombaient avec moins de célérité que celles de l’agence Belga. Il faut dire que rarement, les infos ont circulé avec aussi peu d’enthousiasme. Souci des organisateurs de préserver leur « cher » programme, manque d’intérêt en général, période chagrine, allez savoir. Donc comme notre Jean-Claude Van Damme national, il fallait être particulièrement « aware »…

Trois mauvaises nouvelles tombaient pratiquement au même moment: on apprenait ainsi que malgré une réelle volonté des parties prenantes, il n’y aurait pas de Citroën DS3 R3T au départ du Rallye du Condroz. Cette information venait directement d’Yves Matton, distributeur des produits Citroën Racing pour le Benelux et organisateur du Citroën Trophy Benelux. « Le projet initial était d’aligner la première DS3 construite dans nos ateliers, mais il est rapidement apparu qu’il ne serait pas possible de l’avoir terminée pour le Condroz. D’autres solutions existaient pour disposer d’une voiture. Mais comme il n’y avait pas vraiment de budgets disponibles et que Hans Weijs, qui était intéressé à l’origine, a encore une carte à jouer dans le Trophy avec sa C2-R2 Max, il n’y aura donc pas de DS3 au départ du Rallye du Condroz. »

Ensuite, une autre bombe tombait: l’annulation de la spéciale de Villers-Le-Bouillet en raison – officiellement - de difficultés pratiques pour sa mise en place. Elle ne serait malheureusement pas remplacée par un autre secteur chronométré au grand dam des amateurs de cette classique du rallye. Une triste nouvelle donc et une assez mauvaise gestion de l’organisateur car l’annulation n’était pas du fait de la commune qui était bien ouverte au passage du rallye, la raison première étant bien une question d’argent...

Enfin, Patrick Snijers annonçait faire l'impasse sur l'édition 2010 du Rallye du Condroz. « Il y a 95% de chance que je ne roule pas... J'ai actuellement le budget nécessaire pour louer une groupe N mais ça ne m'intéresse pas. Je travaille pour l'année prochaine car je veux continuer à rouler. » Snijers absent au Condroz, cela n'était plus arrivé depuis des années !

Heureusement les bonnes nouvelles commençaient à venir avec la venue de Bernd Casier sur la Ford Focus WRC de Steven Vergalle. Casier s’explique: « Steven me fait de très bonnes conditions. Cependant, je n'ai pas un gros budget. Je ne ferai pas d'essais et je ne serai pas présent au shakedown car chaque kilomètre coûte cher. Il va falloir que je trouve vite le bon rythme en course. Je ne me mets pas trop la pression... ».

Les amateurs de Subaru pouvaient également s’estimer heureux avec pas moins de six pilotes qui étaient susceptibles de prendre le départ du rallye du Condroz au volant de Subaru Impreza WRC : Lietar, Bonjean, Grooten, Deferm, Bouche et Debackere qui récupérait l’Impreza ex-Snijers.

Mais peut-être était-ce en Groupe N que la course serait la plus passionnante à suivre avec trois prétendants pour un titre groupés en 3 points avant la dernière manche du championnat ? Langenakens, Lhonnay et Alexandre Romain pouvaient encore coiffer le titre avec leur Mistubishi Lancer respective. La bagarre serait arbitrée par les deux Subaru d’Olivier Collard et Matthias Boon.

Du côté de la Mélodie du Bonheur, entendez par là, des Porsche, la rumeur faisait état du retour de Van Parijs et des présences de Gaban et Duez, sauvé in extremis par son copilote. Un somptueux match arbitré par la Nissan de Van Woensel. C’est qu’il faudrait être sévèrement burné pour rouler avec des GT dans l’enfer condruzien ! On ajoute pour le spectacle la BMW M3 de Verreydt.

Autre nouvelle rassurante pour le plateau: l’engagement des Skoda Octavia WRC du team BMA pour Dominique Jullien et Jean-Pierre Van De Wauwer. L’un étant revenu sur sa décision prise au Condroz l’an dernier d’arrêter la compétition et l’autre particulièrement en verve après une victoire aux 24h 2CV et une seconde place au JMC Rally.

Avec l’avènement du très intéressant groupe R, la liste des bonnes tractions serait des plus attractives avec les Clio de Princen et Cherain d’autant plus que le titre n’était pas encore joué au sein du Citroën Racing Trophy Benelux avec trois pilotes encore en lice: Baugnet, leader avant le Condroz devant Croes et le Hollandais Hans Weijs Jr. Yves Matton était également annoncé à domicile. Dans le Fiesta Sport Trophy, tout était également encore possible pour le jeune Demaerschalk pour remonter et passer Cédric De Cecco.

Donc, les verres se remplissaient dans l’allégresse et on n’oublierait bien sûr pas la longue listes de bons pilotes amateurs, ceux qui font le spectacle dans l’anonymat. Ceux qui font le rallye. Qu’allait-il en être de toutes ces annonces, de tous ces pronostics ?

Jeudi 4 novembre - Ben-Ahin: Shake down

Un petit bol d’air sur les hauteurs de Henimont. Un temps trop doux pour la saison, les feuilles tombent, le sol est gras. Quelques uns vont se faire des chaleurs. On apprend le forfait de Princen. Neuville et Verreydt sont en grande forme.

Vendredi 5 novembre – Avenue Delchambre. Contrôle technique

Un œil sur le parc fermé des concurrents: certes, l’affiche est un peu moins spectaculaire qu’en 2009, néanmoins elle ne manque pas d’intérêt et bien loin s’en faut, d’ailleurs ! Les présages lus dans le houblon étaient pratiquement tous vrais. Manquent juste à l’appel la Clio de Kris Princen en manque de budget et Bruno Thiry qui est à Huy en spectateur. Dommage, ces deux-là nous auraient offert d’excellentes prestations. Effet de la crise, les stands sont plus modestes et les éclairages moins bling-bling.

Samedi 6 novembre

C’est la courte spéciale de Bas-Oha qui marque le début des hostilités. Sur les 6.55 km, Casier sur sa Focus WRC signe le scratch devant les deux S2000 de Neuville et Loix. Melissa Debackere prend la mesure de sa voiture et pointe seulement à la 14ème position avec un écart de 19 secondes. Handicapé par des problèmes d’essuie-glace, Dominique Jullien ne signe que le 45ème temps. Sur une Octavia WRC identique, Van de Wauver est 7ème.

J’attends de pied ferme les concurrents dans le célèbre passage dit « des crasses » à la fin de Strée. La spéciale compte 14.37km et termine ce premier tronçon avant le regroup’ à Huy. Comme d’habitude, la route est grasse et glissante. Il pleut à verse quand arrivent les premiers concurrents. Casier, Neuville et Loix prennent les 3 premières places. Bonjean et Jullien dans un style flamboyant font le forcing. En GT, Gaban colle 14 secondes à son second, Van Woensel. Romain devance Lhonnay en groupe N. Là aussi, la bataille s’annonce rude.

Clavier débute la partie de l’après-midi. Casier émerge en tête, accroissant son avance sur les deux S2000 de pointe. Dominique Jullien sort très violement contre un arbre. Son copilote est amené à l’hôpital pour un check-up. La Skoda BMA est détruite. Posté dans le juge de paix, Marchin-Goesnes, j’observe la sortie d’un droite très glissant pour une descente en léger dévers vers la gauche puis une courte relance avant un « quitter droite » étroit et très glissant.

Casier passe dans un style heurté, il a une crevaison lente à l’arrière. Loix et Neuville sont époustouflant. Debackere est prudente mais néanmoins rapide. Deferm passe en force de même que Van de Wauver. Matton se fait une belle frayeur en escaladant le talus avec sa C2R2 imité par bon nombre de pilotes de Citroën identiques. Dans les locaux, Canal-Robles sur sa Peugeot 106 Groupe A fait un superbe passage et signe un 44ème temps très convaincant.

Le « local hero de Ben-Ahin », Etienne Monfort est déjà manquant: une fois de plus la belle Clio Kit Car du sympathique résident de Solières ne roulera pas dans son jardin. Gaban fait le 9ème temps. Faut le faire sur une pareille patinoire ! Les frères Fagot respectivement engagés sur une Escort MK1 (Paul-Henri) et une MK2 (Didier) se classent 72ème et 110ème à domicile. Van Parijs n’est pas passé. Il reviendra en Super Rallye.

Le second passage en Hesbaye, voit Neuville reprendre 1 petite seconde à Loix. Mais il n’y a pas de changement en tête de la course. La nuit tombe lentement sur le Rallye du Condroz et certains entament une belle remontée. Lhonnay, Matton, Verreydt et Duez sont de ceux-là. Des hommes expérimentés et dont la connaissance du terrain est excellente. Hélas Neuville va connaître une cascade de problèmes qui vont lui coûter sa troisième place.

Marchin/Goesnes, 20h00. Humide et frais avec une température de 8°. Les concurrents terminent cette première journée de course par 17 km d’intense effort. Par expérience, je sais que le coup de poker se joue dans cette spéciale où tout peut arriver. Je me souviens avec émotion comment j’avais rattrapé et dépassé les 2 concurrents partis devant moi en 1991 mais aussi quel revers j’avais subi en 1996 au volant d’une Clio Williams à l’agonie dans cette même spéciale.

Loix signe le meilleur temps devant Casier. La Subaru de Bonjean est repoussée à 30 secondes.La seconde Fabia S2000 de Vanwinjsberghe est 4ème. Canal-Robles confirme sa grande forme en signant le 23ème temps. Duez et Verrydt ne se quittent plus (12ème et 13ème). Le régional Doha et sa Subaru se classent 38ème de la spéciale et Frederic Hébette amène sa Saxo à la 39ème place.

A Huy, au moment où les cafés se remplissent de supporters et que les VIP s’assoient à table, la hiérarchie en tête de la course se compose donc de  Casier suivi de Loix à 27’’ et Bonjean à 3’12’’. Neuville est 5ème à 4’35’’ et le 6ème, Lhonnay, domine maintenant de la tête et des épaules le groupe N avec sa Mitsubishi Evo.

Cherain rentre sa Renault Clio R3 en tête de sa catégorie et occupe la 7ème place provisoire du classement général. En GT, la lutte est magnifique entre la Nissan de Van Woensel et la Porsche de Duez, respectivement 12ème et 13ème. L’écart n’est que de 4’’. Yves Matton est surprenant 16ème au prix d’une belle attaque au volant de sa Citroën. Il devance même le rapide Weijs Jr. Canal-Robles termine sa journée à la 29ème position. P-H Fagot place son Escort RS à la 75ème place et son frère est pointé 99ème.

Dimanche 7 novembre

Lavoir (11 km) ouvre le bal avec de fameux rebondissements: Casier sort tandis que les Subaru WRC de Debackere et Bonjean renoncent. Le suspense est décapité.

Le morceau de la journée est constitué par la longue spéciale de Wanze-Marneffe (21.50km). Rapide mais terriblement piégeuse, elle voit émerger Freddy Loix en tête devant  Neuville. A noter que les deux protagonistes y réalisent le même temps de 11’21’’.

En regard, Ben-Ahin semble anodine avec ses 5.62 km. Mais attention : il s’y passe toujours quelque chose. Duval ne me contredira pas puisqu’il s’est sorti ici même l’an dernier. Cette fois, c’est Dominique Bruyneel qui l’imite. Arrivée un poil trop vite dans le dernier gauche avant l’arrivée, la Subaru tape le talus et pivote sur le toit. La tête de Bernard Munster arrivé sur le théâtre de l’abandon en dit long….

Le regroup’ de Huy vient bien à point pour les machines et les hommes.

Si la course semble désormais jouée pour le premier, la bagarre continue dans toutes les catégories. Lhonnay s’est installé en tête du groupe N. En GT, Marc Duez prend lentement l’ascendant sur la Nissan de Van Woensel. Dans le challenge C2R2, Matton joue les arbitres mais Weijs Jr remonte sur Baugnet. En Historic, on note la superbe course de l’Opel Transeurope superbement menée par Monnens.

La pluie redouble maintenant sur la région. A tel point que la spéciale de Ben-Ahin doit être annulée pour des raisons de sécurité et au grand dam de la très nombreuse foule amassée au long des 6km.

Il reste à Loix de contenir le retour de Neuville. La Skoda va s’acquitter de cette tâche avec facilité. 18h30. La Skoda de l’équipe de René Georges de l’équipage Loix-Miclotte monte sur le podium et remporte ce 37ème Rallye du Condroz.

En groupe N, Stéphane Lhonnay est vainqueur et remporte ainsi le Championnat. Associé à Botson, il termine sur la troisième marche du podium. Grooten-Delmelle terminent 4ème sur leur Subaru Impreza. Ils remportent quand à eux le groupe A. En GT, belle victoire de Marc Duez (7ème) devant la Nissan de Van Woensel.

Et les régionaux ? Matton termine à une très belle 12ème position. Il est néanmoins devancé par Verrydt, le poète de Villers-Le-Temple qui classe sa BMW M3 à la 10ème place. Doha-Warzée réguliers et performants tout au long du WE placent leur Subaru Impreza Groupe A en 21ème position. Ils sont devancés par Canal-Robles navigué par De Preter qui confirment tout le bien qu’on pense d’eux en réalisant l’exploit de classer leur modeste Peugeot 106 GTI Groupe A à la 18ème place. Un des meilleurs performers du rallye !

Fred Hébette qui faisait pour la première fois équipe avec la jeune Van Houdenove remporte la classe M-14 et se hisse au 34ème rang final. Castremanne et son antique mais efficace Suzuki Swift réalisent l’autre exploit du rallye en terminant 1er en M-13 et 20ème au général. Delooz-Henri classent leur Mitsubishi Groupe A à la 69ème position. Paul-Henri Fagot termine 55ème au général et remporte la catégorie Historic du rallye.

Une fois de plus, le Rallye du Condroz a tenu ses promesses et a offert aux spectateurs un spectacle merveilleux !

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Commentaires des spectateurs et des participants: http://www.tout-le-rallye.be/forum/rallye-du-condroz-f33.html

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