Vallée de Munster à l’aube…

Nous laissons la voiture dans un chemin forestier et partons à pied vers le sommet de cette spéciale longue de 22,33 km qui est la troisième de la première étape. Le chemin balisé monte sans discontinuer. On se croirait dans une marche ADEPS tant les sacs à dos et les sticks de marche sont nombreux.

Arrivé à destination, je découvre un superbe paysage. Au loin, les sommets de Turckheim et Niedermorschwihr sont parcourus par des lambeaux de nuage. Il fait frais et le soleil se lève lentement. Un vin chaud nous aide à meubler la longue attente. Déjà le balais des hélicoptères VIP et TV trouble cette apparente quiétude d’autant plus que la foule continue d’affluer. Parlons en de cette foule : elle est calme, tranquille, sereine et disciplinée. On est loin de l’exubérance des Belges lorsqu’il s’agit de prendre possession sauvagement d’un endroit de passage... Pourtant on voit bien que certains sont là uniquement pour voir passer le Dieu vivant, l’enfant du pays : Sébastien Loeb. On reconnaît vite ce spectateur occasionnel à son manque de connaissance sur le sujet rallye ou parfois à ses vêtements et chaussures peu adaptés au terrain. Pas de doute: le rallye est un succès: l’engouement est total. Tant mieux !

La voiture zéro - une Citroën DS3 - pilotée par Philippe Bugalski passe et un murmure parcours le flanc de la montagne. D’où nous sommes, nous pouvons voir le freinage pour une épingle droite. Sa sortie est suivie d’une ligne droite de plus ou moins 800m puis un freinage sur une bosse pour un double gauche bosselé et vicelard (qui sera fatal à la Ford Fiesta S2000 du jeune Julien Maurin) avant une relance en côte qui donne sur une corde marquée par un solide rocher pour un droite rapide et un nouveau freinage avant une épingle.

La Citroën du champion français déboule déjà. Il freine très tard à l’épingle qu’il passe très (trop !) proprement avec une précision micro chirurgicale. La ligne droite est avalée en quelques secondes. Les suspensions de la C4 WRC se jouent du freinage bosselé et le voici déjà devant nous. Il y a une compression juste au point de corde et je m’attends à voir la voiture talonner quelque peu… Que nenni ! Le français est prudent et ne tente pas de tutoyer de trop près le rocher. Voilà, Loeb est déjà un souvenir. Chirurgical mais… anesthésiant. Oui, je sais je vais faire bondir certains. Mais le pilotage de Loeb est ainsi. Efficace, fulgurant, mais trop propre. Au passage, je peste contre ces maudites vitres teintées qui m’empêchent de voir l’équipage au travail.

Sordo, Solberg et Ogier passent dans des styles tous similaires. Là aussi, c’est rapide, net. On sent néanmoins Sordo bien remonté et bien plus à l’aise qu’Ogier qui met peut-être la charrue avant les bœufs. Mais le mano à mano des deux Seb l’an prochain s’annonce âpre. Ogier est en pleine progression mais le mental suivra-t-il ? La solidité des nerfs de Loeb risque d’être un fameux avantage, mais nous verrons… Pour l’instant, le Dieu alsacien est en état de grâce.

Les Ford d’Hirvonen et de Latvala sont vite également mais on remarque une légère différence de précision. On dirait les Focus moins efficaces en tenue de route, moins incisives. Ce serait intéressant de voir Loeb au volant d’une Ford et de comparer. Ken Block et Raikonnen sont intéressants à voir passer. Avec une préférence pour le flamboyant américain pourtant moins à l’aise sur une spéciale de rallye que dans les gymkanas de ses vidéos de folie.

Derrière les voitures de pointe, la lutte est âpre et tous ceux qui suivent, surtout les pilotes de la manche nationale ont bien du mérite de rester sur la route, tant le privilège d’ouvrir la route est réel: en effet, l’asphalte se salit vite de la boue tirée des cordes par le passage des premiers.

La foule est là pour son champion et Loeb a rendez-vous avec l’histoire. Il dominera allègrement son sujet tout au long du week-end pour être sacré à domicile Champion du Monde des Rallyes pour la 7ème fois dans le village même où il a grandi. Devant l’hôtel de ville d’Haguenau, Sébastien Loeb et Daniel Elena remportent donc leur soixantième victoire en WRC tandis que les seconds - Dani Sordo et Diego Vallejo - permettent à Citroën de remporter un sixième titre de Champion du Monde des Constructeurs.

Satisfaction belge, si Tsjoen est contrait à l’abandon sur problème mécanique de sa Focus, Stéphane Prévot a parfaitement assuré son intérim aux côtés du pilote norvégien en terminant 9ème du rallye et officieusement premier S2000 avec Henning Solberg. Le duo inédit devance le Suédois Patrick Sandell (Skoda Fabia S2000), vainqueur de la catégorie SWRC.

Rendez-vous l’an prochain !

Classement final:

  • 1    -    Loeb-Elena    Citroën C4 WRC    A8    3h05’49’’2
  • 2    -    Sordo-Marti    Citroën C4 WRC    A8    à 35’’7
  • 3    -    Solberg-Patterson    Citroën C4 WRC    A8    à 1’16’’8
  • 4    -    Latvala-Anttila    Ford Focus WRC 09    A8    à 1’29’’3
  • 5    -    Hirvonen-Lehtinen    Ford Focus WRC 09    A8    à 3’43’’8
  • 6    -    Ogier-Ingrassia    Citroën C4 WRC    A8    à 11’55’’9
  • 7    -    Villagra-Curletto    Ford Focus WRC 08    A8    à 14’15’’4
  • 8    -    Wilson-Martin    Ford Focus WRC 08    A8    à 14’26’’9
  • 9    -    Solberg-Prévot    Ford Fiesta S2000    N4    à 16’48’’9
  • 10    -    Sandell-Axelsson    Skoda Fabia S2000    N4    à 17’12’’3